Ce Lundi 16 Janvier 2023, j’ai assisté pour la seconde fois au salon Vinapogée qui est un salon de vignerons et de maisons de la France entière qui font goûter des millésimes antérieurs. En plus, l’organisation propose des masterclass sur des thèmes spécifiques avec les chefs de cave qui ont produit les cuvées.
Ainsi, j’ai pu assister à l’horizontale 2003 des Porto (Croft, Fonseca & Taylor’s) avec David Fonseca et la verticale des Rosé des Riceys d’Alexandre Bonnet en compagnie du président de la maison Arnaud Fabre ainsi que le chef de cave Alain Pailley à la vinification depuis 1985.
Cette maison proposait une rétrospective de plus de 40ans sur une AOC méconnue de Champagne (seulement 60.000 bouteilles produites dans plus de 330 millions de bouteilles de champagnes), en effet le Rosé des Riceys est une AOC de vins rosés non effervescents et n’est produit que dans un village, situé le plus au sud de la Champagne, juste à quelques dizaines de kilomètres de Chablis. C’est pourtant la commune en AOC Champagne la plus vaste de l’appellation avec ses 350 hectares. Mais seulement une soixantaine de parcelles sont classées pour cette AOC non effervescente qui peuvent aussi produire du Champagne.
Avec le champagnes Alexandre Bonnet, la verticale déclinait leur contrée « La Forêt » jusque 1980, c’est une parcelle de 4 hectares sur sol argilo-calcaire (sol rouge, il existe 2 types de sol au Riceys, les sols « gris » pauvres sont les 2ème, ici article de 2016 sur le terroir des Riceys). Cette parcelle est orientée plein sud afin d’avoir les raisons mûrs et un état sanitaire parfait pour faire le Rosé des Riceys. Les raisins sont récoltés chauds pour lancer la fermentations plus rapidement car les vins sont peu protégés, pas d’éraflage également.
Travaillant avec Olivier Horiot, je connaissais déjà bien cette appellation. Le Rosé des Riceys est une vinification en vin rouge dont on évite l’extraction des tanins tout en ayant extrait les arômes fruités ainsi que la couleur parfois. D’où cette dénomination « Rosé »… C’est un processus exigeant qui demande beaucoup d’attention car ce goût « Rosé des Riceys » n’est présent que quelques heures avant que l’extraction des tanins se fasse. Il faut donc décuver très rapidement pour ne pas passer définitivement sur un coteau champenois rouge. Le but est d’avoir un vin coloré avec un déséquilibre sucre / acide et un support tanique léger. Cette acidité est présente sur les 6 millésimes suivants :
Rosé des Riveys « La Forêt » 2019 :
C’est le vin commercialisé actuellement. Il est chaleureux mais à un grain fin et une belle nervosité tout de même. Encore trop jeune, il faudra l’attendre entre 5 et 7ans.
Rosé des Riveys « La Forêt » 2012 :
Egalement sanguin, le jus est resserré mais dispose d’une très joli fruité. Après la masterclass, le fruit s’était libéré et le vin avec un équilibre parfait. C’est le moment idéal pour boire cette cuvée.
Rosé des Riveys « La Forêt » 2002 magnum :
Toujours cette fraicheur (acidité) et ce touché caressant sur ce magnum, mais on sent un fruit très mûr comme le 2019.
Rosé des Riveys « La Forêt » 1996 :
Millésime acide. Au premier passage, le vin libère moins de fruit que le 2002. Mais après 30 minutes dans le verre, le fruit est enivrant, long, sur les violettes, avec des légères notes tertiaires qui viennent complexifier la vin, c’est clairement la bouteille de la dégustation!
Rosé des Riveys « La Forêt » 1989 :
Nous sommes ici sur les arômes tertiaires à fond et le vin pêche sur l’acidité. Ce n’est pas lourd mais pas nerveux non plus, on pourrait dire un vin « mou » mais bizarrement ce vin reste le même après 30 minutes dans le verre. Les tertiaires prennent même un peu plus de volume.
Rosé des Riveys « La Forêt » 1980 :
C’est le dernier millésime vendangé en Octobre, avec un support acide indéniable qui tient encore le vin. On est sur le même profil aromatique que le 1996, c’est très joli mais pas assez expressif, voir même un peu rustique et pas assez floral pour les autres millésimes précédents.
Il ne faut tout de même pas descendre ce vin car il s’est parfaitement conservé sans structure tannique et est très agréable à boire.
De grandes maisons champenoises étaient également présentes Philipponnat, Bollinger, Pol Roger, Ruinart & Alfred Gratien. Ayant eu un échange très intéressants sur la masterclas des Rosé des Riceys à laquelle il a participé, j’ai oublié de prendre les photos des flacons qu’il avait amené pour ce salon, ainsi j’ai adoré le magnum de grand blanc de blancs 2012 récemment dégorgé, ainsi que leur cuvée 1522 millésime 2005 dégorgé en 2017. Mais la palme revient à Pol-Roger qui a proposé 3 énormes champagnes mûrs, évolués et prêts à boire : Winston Churchill 2004, brut vintage 2002 et rosé vintage 1999 (certainement la moins évoluée des 3 d’ailleurs)! Sur les mêmes profil et fraicheur, de beurré et de maturité, les millésimés Alfred Gratien, élevé sous liège, leur ont tenu la dragée haute : 2009 en magnum et Memory 1999.
Cela prouve que le Champagne est un vin et est propice à une belle évolution en cave, et gagne même en complexité.